Mme Michelle Ploughman

Ph. D., professeure

photo of Dr. Michelle Ploughman


Professeure, Faculté de médecine de l’Université Memorial de Terre-Neuve

Neuroscientifique et chercheuse en physiothérapie, madame Michelle Ploughman consacre ses travaux à la mise au point d’interventions de réadaptation novatrices et potentiellement très efficaces, capables non seulement de rétablir les capacités fonctionnelles, mais également de favoriser la plasticité du cerveau. En s’appuyant sur l’expérience qu’elle a acquise durant 30 ans dans le domaine de la réadaptation dans le contexte des accidents vasculaires cérébraux (AVC) et de la sclérose en plaques, elle essaie de trouver des solutions aux problèmes qui sont importants aux yeux des personnes ayant subi un AVC ou vivant avec la SP. Son objectif consiste aussi à permettre aux professionnels de la santé de disposer de meilleurs outils et techniques. Elle est titulaire de la chaire de recherche du Canada (de niveau 2) en réadaptation, en neuroplasticité et en rétablissement des fonctions cérébrales, et professeure en physiatrie et en réadaptation à la Faculté de médecine de l’Université Memorial.

Mme Ploughman s’est toujours intéressée à la façon dont l’intensité de la réadaptation influe sur le rétablissement fonctionnel. C’est pourquoi, à l’occasion de la rédaction de son mémoire de maîtrise, elle a choisi de consacrer son premier essai clinique – qu’elle a mené au sein d’une unité de réadaptation de l’AVC pour des patients hospitalisés – à un traitement intensif de deux semaines faisant appel à la thérapie par contrainte et axé sur la réadaptation des mains et des bras. Dans le cadre de ses travaux de recherche doctorale, financés grâce à une subvention accordée conjointement par la Fondation des maladies du cœur du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), Mme Ploughman a exploré les aspects mécanistiques des effets de l’intensité de l’activité physique sur le taux de neurotrophines ainsi que sur les changements touchant les synapses et les cellules dendritiques chez un modèle animal d’AVC. Elle a effectué son stage de recherche postdoctorale au Centre régional de recherche et de formation stopSP de l’Université Dalhousie. Après avoir obtenu une bourse de recherche postdoctorale des IRSC à l’issue d’un concours très sélectif, Mme Ploughman a bénéficié d’un soutien financier, puis mis à contribution son important réseau de collaborateurs à l’échelle nationale pour entreprendre une enquête sur la santé et le vieillissement des Canadiens atteints de SP.

Elle a également lancé le premier programme de recherche en réadaptation de Terre-Neuve-et-Labrador et ouvert son laboratoire (Recovery & Performance Laboratory – laboratoire de recherche sur le rétablissement fonctionnel et les capacités fonctionnelles) au sein d’un centre de soins tertiaires en réadaptation en 2014. Ce laboratoire, qui est financé par la Fondation canadienne pour l’innovation, est équipé d’une série d’appareils pour les épreuves d’effort et l’entraînement (chariot métabolique, tapis roulant muni d’un harnais de sécurité, vélo allongé, moniteurs de la fréquence cardiaque), d’une station d’évaluation de l’excitabilité du cerveau au moyen des systèmes de neuronavigation Magstim BiStim et Brainsight Neuronavigation, d’un tapis de marche (Protokinetics) permettant d’analyser la démarche et l’équilibre, en plus de comprendre un espace d’évaluation privé, équipé d’une table hydraulique et du matériel et des logiciels nécessaires à la collecte et à l’analyse de données.

Questions et réponses avec Mme Ploughman

Offrez-vous aux membres du grand public, et particulièrement aux personnes touchées par la SP, la possibilité de prendre part à vos travaux? Dans l’affirmative, pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?

La participation des gens vivant avec la SP est essentielle aux travaux que mes collaborateurs et moi entreprenons. Des personnes atteintes de SP siègent à un comité consultatif officiel chargé de diriger nos programmes de recherche. Je conçois mes projets de recherche en fonction des problèmes que me rapportent les personnes atteintes de SP avec qui je travaille, que ce soit dans le cadre de mes activités en laboratoire ou de ma pratique en physiothérapie. À l’échelle locale, régionale et nationale, j’ai également mené un certain nombre de présentations et dirigé des discussions de groupe auxquelles participaient des personnes ayant la SP, des professionnels de la santé et des décideurs en matière de politique. Grâce aux liens étroits que mon laboratoire entretient avec la collectivité de la SP de notre région, j’ai pu collaborer avec la section de la Société de la SP à l’œuvre au sein de notre localité pour mettre sur pied un programme communautaire axé sur la pratique de l’exercice à l’intention des personnes aux prises avec des incapacités.

Qu’est-ce qui vous a amenée à vous intéresser à la recherche sur la SP? Qu’est-ce qui vous incite à poursuivre des travaux dans ce domaine?

C’est pendant la période où j’ai été physiothérapeute dans une clinique de SP que je me suis rendu compte que les patients recevaient des éléments d’information ambigus et parfois contradictoires sur l’exercice et la réadaptation. J’ai découvert à l’époque que le corpus de données probantes à l’appui de l’utilisation de l’exercice et de la réadaptation chez les personnes atteintes de SP était très limité, contrairement à celui dont on disposait pour d’autres troubles neurologiques comme l’AVC. Je me suis donc proposé de remédier à cette situation. J’ai compris que les gens âgés vivant avec la SP depuis des décennies seraient d’importantes sources de connaissances pour quiconque souhaiterait apprendre à mener une longue vie en santé malgré la SP. Mes interactions avec ces personnes m’ont incitée à entreprendre une enquête nationale sur la santé et le vieillissement des gens atteints de SP auprès de 743 d’entre eux répartis aux quatre coins du pays. Par ailleurs, j’étais déterminée à améliorer la prise en charge des personnes atteintes de cette maladie, parce que plusieurs de mes anciens camarades de classe et de mes collègues ont la SP et que je souhaite qu’ils aient de meilleures options à leur disposition.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans la recherche et quels sont les plus grands défis auxquels vous faites face?

J’ai toujours aimé interagir avec les participants à nos programmes de recherche et être ainsi témoin des conséquences directes de ces travaux à l’échelle individuelle. De plus, la supervision des étudiants et les activités destinées à aider ces derniers à acquérir les compétences nécessaires pour former la prochaine génération de chercheurs spécialistes de la SP sont très gratifiantes. Bien entendu, l’obtention d’un financement pour les projets de recherche et d’allocations destinées aux étudiants au cycle supérieur demeure le principal défi à relever. On ne peut pas nier qu’il est parfois difficile de convaincre les organismes subventionnaires de l’utilité et de l’importance de nos projets de recherche.

Quelle importance accordez-vous à la collaboration et dans quelle mesure y avez-vous recours dans le cadre de vos travaux de recherche?

Il est essentiel que je noue des partenariats avec d’autres chercheurs et d’autres laboratoires pour pouvoir mener à bien le type de travaux de recherche que j’entreprends (études d’intervention). Je travaille avec des scientifiques établis dans presque toutes les provinces du Canada et dans d’autres pays. De plus, je collabore étroitement avec des personnes atteintes de SP afin de m’assurer que nos efforts portent bien sur des problèmes qui sont importants à leurs yeux. Tout projet de recherche est une vaste entreprise, et la collaboration est un gage de résultats concluants pouvant changer la donne. Par exemple, depuis 2015, M. Craig Moore, Ph. D., le Dr Mark Stefanelli, neurologue spécialiste de la SP, des membres de la collectivité de la SP de Terre-Neuve-et-Labrador et moi-même avons créé le registre HITMS (Health Innovation Team in MS; équipe d’innovation en santé dans le contexte de la SP), soit une base de données sur le profil clinique annuel des personnes suivies, le fonctionnement des membres inférieurs et supérieurs, la cognition, l’excitabilité du cerveau, la forme physique et le profil neuro-immunitaire. Ce registre vise à nous permettre de comprendre comment les interactions entre les facteurs relatifs à la santé et au mode de vie, tels que la forme physique, d’une part, et l’axe neuro-immunitaire et les facteurs épigénétiques, d’autre part, influent sur la progression de la SP. À ce jour, nous avons recruté plus de 210 sujets atteints de SP (qui comptent plus de 500 visites individuelles). Nous espérons que nos découvertes auront des effets positifs notables sur la vie des personnes atteintes de SP au cours des prochaines années.