Des chercheurs du Canada étudient de nouvelles données sur la dépression chez les personnes atteintes de SP

Contexte

La dépression – caractérisée par la persistance d’une grande tristesse et un désintérêt pour les activités quotidiennes ou l’absence de plaisir à s'y adonner – touche de nombreuses personnes aux prises avec la SP et contribue à diminuer leur bien-être. Déceler la présence de la dépression chez ces personnes s’avère difficile parce qu’il faut déterminer si cet état est un symptôme de SP ou un syndrome indépendant. Cliquer ici pour en savoir plus sur la dépression associée à la SP.

Dans un article récent publié dans Nature Reviews Neurology, le Dr Anthony Feinstein, psychiatre, chercheur subventionné par la Société de la SP, et ses collaborateurs ont passé en revue la littérature scientifique actuelle sur la dépression liée à la SP. Leur analyse a été centrée sur divers aspects : les causes de la dépression, son influence sur l’évolution de la SP, ses facteurs biologiques et psychosociaux, la présence de maladies concomitantes et les options thérapeutiques.

Causes

À la suite de l’évaluation des données génétiques recueillies auprès de personnes atteintes de SP, les chercheurs n’ont pu établir un lien clair entre la dépression et le profil génétique de ces dernières. Par ailleurs, les techniques d’imagerie de pointe ont permis de montrer que certaines modifications structurales particulières du cerveau peuvent être associées à la dépression. Cette information ne constitue néanmoins qu’un morceau du gigantesque casse-tête qui révélera comment et pourquoi la dépression est si répandue chez les personnes atteintes de SP.

L’article fournit également de nombreuses données étayant de plus en plus l’existence d’un lien étroit entre la dépression et divers facteurs psychosociaux. Selon les comptes rendus de recherche, des facteurs tels que le sentiment d’impuissance, l’incertitude face à l’avenir et un degré de stress élevé sont liés à la dépression chez les personnes atteintes de SP, et certaines stratégies d’adaptation peuvent contribuer grandement à prévenir ou à atténuer les symptômes de cette affection.

Influence sur l’évolution de la maladie

En comparant les données cliniques des personnes atteintes d’une forme cyclique (poussées-rémissions) de SP à celles des personnes atteintes d’une forme progressive de SP, les chercheurs ont constaté un degré de dépression accru chez les premières, ce qui donne à penser que le processus inflammatoire pourrait favoriser l’apparition d’une dépression. Les auteurs soulignent, en outre, que certains aspects de la dépression sont sujets à des fluctuations. Dans le cadre d’une étude effectuée auprès de 132 personnes présentant une forme cyclique (poussées-rémissions) de SP, des chercheurs ont remarqué que la dépression s’accentuait parmi les participants après une poussée et disparaissait graduellement. Bien qu’une amélioration de l’état des patients ait été observée, le taux de dépression demeurait élevé six mois après le début des symptômes, ce qui laisse supposer que, malgré la survenue d’une rémission, certaines personnes atteintes de SP ne se remettent peut-être pas complètement de leur dépression.

Comorbidité

Des études ont montré que la comorbidité peut contribuer au déclenchement de la dépression et influer sur la gravité de celle-ci chez les personnes atteintes de SP. La comorbidité est définie comme la présence d’autres troubles que la maladie primaire, en l’occurrence la SP. Par exemple, les chercheurs ont remarqué que les personnes atteintes de SP et de dépression peuvent également présenter de la fatigue. Il est toutefois difficile de bien comprendre la relation entre ces affections, étant donné que la fatigue peut survenir en l’absence de dépression ou en tant que symptôme de dépression. Cependant, les auteurs suggèrent que le traitement de la dépression peut atténuer la fatigue.

L’anxiété et les troubles associés sont aussi très répandus chez les personnes atteintes de SP et touchent près des deux tiers de ces dernières lorsqu’elles souffrent également de dépression. À l’instar de la dépression, l’anxiété est difficile à diagnostiquer chez les personnes atteintes de SP, en raison du chevauchement des symptômes. Soulignons que la recherche a permis de montrer que les personnes atteintes de SP et souffrant de dépression et d’anxiété ont tendance à avoir des pensées autodestructrices et à avoir du mal à interagir avec les autres.

Des troubles cognitifs sont observés chez plus de la moitié des personnes atteintes de SP. Ils peuvent toucher la mémoire, l’aptitude au raisonnement complexe et le traitement de l’information. Les chercheurs croient que la dépression peut influer négativement sur la cognition, mais ils ne savent pas encore si le traitement de la dépression peut renverser l’évolution des troubles cognitifs. Grâce aux techniques d’imagerie, les chercheurs parviendront à confirmer ou à infirmer le lien entre les troubles cognitifs et la dépression chez les personnes atteintes de SP. C’est pourquoi la recherche doit se poursuivre.

Traitement

Les personnes atteintes de SP et de dépression peuvent être traitées par des médicaments, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) et l’exercice. Pour sa part, la TCC aide les gens à comprendre les pensées et les sentiments qui influencent leurs comportements. Une étude a montré que la TCC pouvait être aussi efficace que les antidépresseurs. Les travaux dans ce domaine n’en sont qu’à un stade préliminaire, et bien que la TCC semble bénéfique, d’autres études et essais cliniques doivent être effectués avant qu’on puisse en établir l’efficacité. 

Commentaires et orientations futures

Selon les chercheurs, si nous voulons approfondir les connaissances sur la dépression associée à la SP et améliorer les soins cliniques aux personnes atteintes à la fois de SP et de dépression, nous devons accorder la priorité aux deux objectifs suivants : définir clairement la nature biologique et psychosociale de la dépression chez les personnes atteintes de SP et élaborer une définition rigoureuse de la dépression, qui pourra servir à l’établissement d’un diagnostic exact.

En ce qui a trait au traitement de la dépression, les chercheurs croient que la meilleure approche consiste à associer plusieurs thérapies. (Lire la description de l’étude du Dr Neil Rector, de l’Institut de recherche Sunnybrook, à Toronto, sur l’association de la TCC et de l’exercice pour traiter la dépression et les troubles cognitifs chez les personnes atteintes de SP. Cette étude est subventionnée par la Société de la SP.) Une bonne compréhension de la dépression chez les personnes atteintes de SP est essentielle à l’élaboration de stratégies efficaces visant à atténuer non seulement les symptômes de la dépression, mais également ceux d’autres troubles liés à cette affection. Ainsi, la santé en général et la qualité de vie des personnes aux prises avec la SP en seront améliorées.

Source

FEINSTEIN, A. et coll. « The link between multiple sclerosis and depression », Nat Rev Neurol, 2014 Aug 12 [diffusé en ligne avant l’impression].