Contexte
Environ la moitié des personnes qui vivent avec la sclérose en plaques (SP) ressent de la douleur associée à la SP. Cette douleur proviendrait, croit-on, de la détérioration et de l’inflammation du système nerveux central (SNC), qui entraîneraient le dérèglement du traitement ou de la transmission des messages de douleur envoyés au SNC par l’organisme. Prenant toutes sortes de formes, la douleur peut apparaître sans aucune raison évidente ou être provoquée par un simple effleurement de la peau, se manifestant par exemple par des sensations de brûlure, des picotements douloureux ou des spasmes musculaires. Dans tous les cas, elle altère la qualité de vie et suscite des besoins importants pour les personnes qui vivent avec la SP.
L’exercice compte parmi les traitements antidouleur prometteurs à l’étude présentement, étant donné qu’il s’est montré bénéfique contre d’autres symptômes de la SP, telles la dépression, la fatigue et l’anxiété. Une équipe de chercheurs de l’Université de l’Alberta, subventionnée par la Société de la SP – dont font partie M. Curtis Benson, étudiant au doctorat, et le Dr Bradley Kerr, titulaire d’une bourse de perfectionnement Donald Paty – a entrepris de déterminer si la course pouvait freiner la progression de la maladie et abaisser la sensibilité à la douleur chez les souris atteintes d’une maladie semblable à la SP. Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue Experimental Neurology.
Description de l’étude
Une maladie semblable à la SP, appelée encéphalomyélite allergique expérimentale (EAE), a été induite à titre expérimental chez des souris. Chacune d’elles avait la possibilité de courir une heure par jour dans une roue, avant et après l’apparition des symptômes (incapacité fonctionnelle de la queue et des pattes des animaux). L’accès à la roue était limité à une heure afin que la période d’exercice soit d’une durée réaliste pour la plupart des gens. Les effets de la course sur la progression de la maladie et la sensibilité à la douleur ont été enregistrés au fil du temps. Pour évaluer la sensibilité à la douleur, les chercheurs ont eu recours à un test normalisé qui consiste à appliquer des fils (crins de von Frey) de diamètres différents à l’arrière des pattes des souris et à observer les changements de comportement de celles-ci afin de mesurer leur « seuil » de douleur.
Au cours de la dernière phase de l’étude, les chercheurs ont exploré les effets de la course sur l’activité cellulaire des souris atteintes d’EAE. Au moyen de la microscopie et de techniques de dépistage avancées, ils ont étudié la moelle épinière des animaux, qui présentait des lésions analogues à celles de la SP et où se trouvent des cellules nerveuses intervenant dans la transmission des messages de douleur vers le cerveau. Les chercheurs ont mesuré le degré d’infiltration de cellules immunitaires dans la moelle épinière, l’activité des cellules nerveuses (une augmentation de cette activité laisse supposer une multiplication des messages de douleur et, par conséquent, un accroissement de la douleur) ainsi que divers facteurs permettant de déterminer la qualité de la santé générale de la moelle épinière.
Résultats
Les souris qui ont pu courir dans une roue une heure par jour ont présenté des symptômes plus tardivement et une sensibilité à la douleur moindre que celles qui n’ont pas eu cette possibilité. Cependant, la course n’a pas permis de diminuer la gravité des symptômes (incapacité de la queue et des pattes).
L’étude cellulaire a permis de montrer que la course pouvait, d’une part, réduire le nombre de cellules immunitaires s’infiltrant dans la moelle épinière et, d’autre part, atténuer l’activité des cellules nerveuses de la moelle épinière intervenant dans la transmission des messages de douleur vers le cerveau. En général, cet exercice a semblé promouvoir l’amélioration de l’environnement cellulaire de la moelle épinière des souris atteintes d’EAE.
Commentaires
Cette étude révèle qu’une heure de course par jour peut retarder l’apparition des symptômes et amoindrir la sensibilité à la douleur chez la souris atteinte d’une maladie semblable à la SP. Bien qu’il soit difficile de prévoir avec certitude les bienfaits que ces résultats pourraient apporter aux personnes qui vivent avec la SP, il est extrêmement encourageant de constater les effets qu’ont eus sur les souris des périodes de course d’une durée relativement modérée.
Non seulement l’activité physique modérée est généralement considérée comme un facteur de bonne santé, mais selon les données probantes d’expérimentations récentes, elle peut s’avérer une option thérapeutique non pharmaceutique efficace contre de nombreux symptômes de SP lorsqu’elle est associée à la prise de médicaments modificateurs de l'évolution de la SP (voir notre publication récente sur les bienfaits de certains types d’exercice sur la fonction cognitive des personnes qui vivent avec une forme cyclique de SP). Les futures études dans ce domaine pourraient porter sur le type d’exercice, y compris sa durée et son intensité, qui, associé à un traitement pharmaceutique continu, pourrait être le plus bénéfique aux personnes qui vivent avec la SP.
Source
BENSON, C. et coll. « Voluntary wheel running delays disease onset and reduces pain hypersensitivity in early experimental autoimmune encephalomyelitis (EAE) », Experimental Neurology, 2015. Diffusion en ligne avant impression. DOI:10.1016/jexpneurol.2015.05.017.