Contexte
La SP est une maladie fortement liée au genre. En effet, son taux d’incidence chez les femmes est jusqu’à quatre fois plus élevé que chez les hommes. Les raisons de cette différence demeurent obscures, mais les chercheurs soupçonnent qu’elle pourrait être attribuable à des facteurs génétiques, hormonaux et environnementaux. Une étude récente menée à la Faculté de médecine de l’Université de Washington à St. Louis, au Missouri, jette un peu de lumière sur cette question et pourrait mener à l’élaboration de futurs traitements.
Description de l’étude
La Dre Lillian Cruz-Orengo et ses collaborateurs ont étudié une souche de souris présentant des symptômes semblables à ceux de la SP dans le but de comprendre les raisons de la différence existant dans l’incidence de la SP entre les hommes et les femmes. En examinant des segments d’ADN de femelles et de mâles, les chercheurs ont pu mesurer les niveaux des protéines présentes dans le système nerveux central (SNC) – constitué du cerveau et de la moelle épinière – dans le but de déterminer l’importance des différences entre les sexes. Ils ont également examiné des tissus du SNC prélevés à l’autopsie sur 20 personnes, dont 10 avaient été atteintes de SP et 10 n’avaient pas été atteintes de cette maladie.
Résultats
Les analyses de l’ADN ont révélé des différences entre les souris femelles et mâles dans l’activation d’un nombre de gènes du SNC pouvant aller jusqu’à 20. L’un de ces gènes, codant pour une protéine présente dans l’endothélium vasculaire, appelée S1PR2, était en plus forte concentration chez les femelles que chez les mâles. Un tel accroissement a aussi été observé dans des régions du SNC particulièrement vulnérables à la SP. L’analyse subséquente des tissus cérébraux de personnes décédées a étayé les constatations effectuées chez les souris : les taux de S1PR2 les plus élevés ont été relevés chez deux femmes présentant une forme cyclique (poussées-rémissions) de SP. Les chercheurs ont découvert que la protéine S1PR2 jouait un rôle important : elle favorise le passage de certaines cellules au travers de la barrière hémato-encéphalique (sang-cerveau). Par la suite, ils ont permis de freiner la maladie semblable à la SP chez les souris en leur administrant un agent inhibiteur de la S1PR2.
Commentaires
Cette étude est la première à avoir établi des différences dans
la structure du cerveau des hommes et des femmes, différences qui
pourraient expliquer la vulnérabilité accrue des femmes à la SP.
Les chercheurs avancent que l’élévation du taux de S1PR2 dans les
régions du SNC vulnérables à la SP, qui a été enregistrée chez
les femmes, peut entraîner une augmentation du nombre de cellules
qui pénètrent dans le cerveau et y provoquent de
l’inflammation.
En plus d’apporter des indices quant à la différence du taux
d’incidence de la SP entre les hommes et les femmes, les
résultats de cette étude pourraient servir à la mise au point de
traitements contre la forme cyclique (poussées-rémissions) de SP.
Des médicaments ciblant la protéine S1PR2, capables d’en
diminuer l’activité ou l’expression, pourraient limiter l’accès
au SNC des cellules qui entraînent l’inflammation dans cette
région. Soulignons que l’un des médicaments contre la SP
actuellement offert, le Gilenya,
cible d’autres protéines de la famille de la S1PR2. Les
recherches doivent se poursuivre afin de valider les données de
la présente étude et de parvenir à élaborer des médicaments
pouvant cibler la S1PR2.
Source
CRUZ-ORENGO, L. et coll. « Enhanced sphingosine-1-phosphate receptor 2 expression underlies female CNS autoimmune susceptibility », The Journal of Clinical Investigation,8 mai 2014 [diffusion en ligne avant impression].