Contexte
Le soutien du public à la légalisation du suicide assisté par un médecin (ou aide médicale à mourir) n’a cessé de croître au fil du temps dans de nombreux pays. En 2015, la Cour suprême du Canada déclarait, dans l’affaire Carter c. Canada, que des modifications devaient être apportées à certaines dispositions du Code criminel pour que celles-ci soient conformes à la Charte canadienne des droits et libertés. Précisément, la validité des dispositions qui prohibaient l’aide médicale à mourir (AMM) dans certaines circonstances était contestable. À la suite de cette prise de position, le gouvernement fédéral adoptait en 2016 le projet de loi C-14 en vue de permettre aux personnes adultes de demander à recevoir une AMM sous réserve de leur admissibilité à une telle aide.
Description de l’étude
Une équipe de recherche dirigée par la Dre Ruth Ann Marrie – neurologue et chercheuse subventionnée par la Société canadienne de la SP et titulaire d’une chaire de recherche en sclérose en plaques financée par la Fondation de la famille Waugh – a entrepris de cerner l’opinion actuelle des personnes atteintes de SP sur l’aide médicale à mourir. À cette fin, les chercheurs ont réalisé un sondage auprès de personnes atteintes de SP qui faisaient partie d’un registre international, soit le « North American Research Committee on Multiple Sclerosis » (NARCOMS), relativement à diverses situations hypothétiques qui avaient déjà été présentées à des personnes atteintes de SP dans le cadre d’une enquête menée en 1999 par la National MS Society (organisme états-unien de la SP)[1]. Les situations dont il est ici question peuvent se résumer de la façon suivante : 1) douleur intolérable, 2) fardeau financier imposé aux aidants, 3) détresse affective extrême, 4) incapacité à faire des choses propices au bonheur et 5) incapacité à apprécier les choses qui font que la vie vaut la peine d’être vécue. Les répondants étaient invités à signaler à quel point il était probable qu’ils optent pour l’AMM – « fort probablement », « probablement », « probablement pas » ou « aucune probabilité » – s’ils devaient se trouver dans l’une de ces cinq situations.
Résultats
En tout, 7 534 personnes ont répondu au sondage. Environ 80 % de ces personnes étaient des femmes, et les répondants étaient presque exclusivement des Blancs. Approximativement 7 % des répondants ont indiqué qu’ils envisageraient l’AMM s’ils se trouvaient dans n’importe laquelle des situations présentées dans le cadre du sondage. Une proportion importante de répondants ont signalé que l’AMM constituerait pour eux une option s’ils éprouvaient une douleur intolérable (65 %) ou s’ils étaient dans l’impossibilité d’apprécier les choses qui font que la vie vaut la peine d’être vécue (50 %).
Pour chacune des situations prises en considération dans le cadre de leur enquête, les chercheurs ont pu observer une association entre les réponses fournies quant à la probabilité de recourir à l’AMM et les facteurs suivants : situation sociodémographique, degré d’invalidité, état de la personne quant à la dépression ou à la douleur, degré de religiosité et niveau de soutien social. Ils ont également constaté que les personnes bénéficiant d’un niveau de soutien social élevé ou pratiquant une religion étaient moins susceptibles d’envisager le recours à l’AMM que les autres répondants, tandis que les personnes souffrant ou ayant souffert de dépression ou éprouvant une douleur modérée ou intense se sont montrées plus enclines à considérer l’AMM comme une option, quelle que soit la situation hypothétique concernée.
Cela dit, compte tenu des différences constatées quant à l’âge et à l’origine ethnique entre les participants au programme NARCOMS qui ont répondu au sondage et ceux qui n’y ont pas répondu, il importe que d’autres études puissent être menées sur le sujet auprès d’échantillons plus représentatifs de la population atteinte de SP.
Commentaires
De nombreux facteurs influent sur l’attitude qu’une personne peut avoir relativement au traitement ou à la prise en charge de la maladie, notamment en ce qui concerne la planification des soins de fin de vie. Or, certains de ces facteurs, telle la dépression, sont plus courants chez les personnes atteintes de SP qu’au sein de la population générale. Dans le contexte de la SP, la dépression peut être un symptôme de cette maladie ou constituer une affection concomitante, et les données de recherche dont on dispose actuellement suggèrent que plus de la moitié des personnes ayant reçu un diagnostic de SP subiront un épisode dépressif majeur au cours de leur maladie. S’appuyant sur les résultats de leur enquête, la Dre Marrie et son équipe soulignent l’importance de diagnostiquer et de traiter la dépression chez les personnes ayant la SP et insistent sur la nécessité d’un soutien social adéquat pour ces dernières.
La Société de la SP offre une vaste gamme de programmes et de services conçus pour aider les personnes touchées par la SP à composer efficacement avec cette maladie et à la prendre en charge. Les gens qui souhaitent obtenir conseils ou soutien relativement à la SP peuvent communiquer avec un agent info-SP par téléphone, au 1 844 859-6789, ou par courriel, à l’adresse agentinfosp@spcanada.ca.
Référence
MARRIE, R.A. et coll.« High hypothetical interest in
physician-assisted death in multiple sclerosis»,
Neurology®, 2017[publication électronique avant
impression].
[1,2] BERKMAN, C. S., P. F. CAVALLO, W. C. CHESNUT et N. J. HOLLAND. « Attitudes toward physician-assisted suicide among persons with multiple sclerosis », J Palliat Med, 1999;2:51–63.