Contexte
Selon le volume croissant de données, le tabagisme augmente non seulement le risque de sclérose en plaques (SP), mais également le rythme de progression de cette maladie. Bien que certaines études aient porté sur le lien possible entre le tabagisme et la SP, certains aspects de cette relation n’ont pas encore été explorés. Par exemple, serait-il bénéfique de cesser de fumer après avoir reçu un diagnostic de SP?
Ces dernières années, le Dr Jan Hillert, chercheur au centre hospitalier universitaire Solna, à Karolinska, en Suède, a dirigé une équipe de scientifiques désireux de savoir si le fait de cesser de fumer après avoir reçu un diagnostic de SP pouvait influer favorablement sur l’évolution de cette maladie. Les chercheurs voulaient surtout voir si le tabagisme pouvait avoir un impact sur l’apparition de la SP progressive secondaire chez les personnes ayant reçu un diagnostic de SP cyclique (poussées-rémissions). Leurs résultats ont été publiés récemment dans la version en ligne de la revue JAMA Neurology.
Description de l’étude
Les données furent recueillies de 2009 à 2011 à partir des réponses à un questionnaire détaillé soumis aux participants inscrits au registre national des personnes atteintes de SP de la Suède, dans le cadre de l’étude sur les gènes et l’environnement en lien avec la SP. Cette étude était centrée sur les personnes atteintes de SP qui fumaient au moment du diagnostic de SP cyclique. Elle comprenait 332 personnes qui avaient continué de fumer après le diagnostic, et 118 personnes qui avaient cessé de fumer après le diagnostic. Dans le cadre de cette étude, le tabagisme était défini comme le fait de « fumer au moins une cigarette par jour en moyenne » durant un an.
À partir des réponses obtenues à leur questionnaire, les chercheurs ont évalué l’influence du tabagisme sur le temps d’apparition de la SP progressive secondaire chez les personnes qui avaient reçu un diagnostic de SP cyclique, en comparant les fumeurs aux participants qui avaient cessé de fumer.
Résultats
Pour chaque année de tabagisme après le diagnostic de SP cyclique, l’évolution vers la SP progressive secondaire était accélérée de 4,7 pour 100. Ainsi, la forme progressive secondaire est apparue huit ans plus tôt en moyenne chez les personnes qui ont continué de fumer, comparativement à celles qui ont cessé de fumer au moment du diagnostic.
Commentaires
Ces résultats étayent les données probantes d’une étude observationnelle selon laquelle le maintien du tabagisme après un diagnostic de SP a des effets négatifs sur le pronostic de cette maladie : il fait s’accélérer l’évolution de la SP cyclique vers la SP progressive secondaire. Qui plus est, l’effet est cumulatif, c'est-à-dire que chaque année additionnelle de tabagisme accélère de 4,7 pour 100 l’évolution vers la SP progressive secondaire. Dans l’ensemble, ceux qui ont continué de fumer ont vu apparaître la SP progressive secondaire huit ans plus tôt que ceux qui avaient cessé de fumer au moment du diagnostic de SP cyclique.
Cette étude vient accroître le volume déjà considérable de données probantes selon lesquelles le tabagisme est associé à diverses maladies. Elle apporte également aux personnes atteintes de SP des raisons de plus d’éviter ou de cesser de fumer si elles veulent ralentir le rythme d’évolution de cette maladie. D’autres questions demeurent toutefois sans réponses : « Quels effets peut avoir l’usage occasionnel du tabac sur le pronostic des personnes qui vivent avec la SP? Cesser de fumer peut-il faciliter la prise en charge des symptômes et prévenir la progression de la SP à n’importe quel stade de la maladie et non seulement au moment du diagnostic? »
Source
RAMANUJAM, R. et coll. « Effect of smoking cessation on multiple sclerosis prognosis », JAMA Neurology, 2015, DOI: 10.1001/jamaneurol.2015.1788.