Résultats d’une étude clinique de phase II sur un traitement potentiel contre la SPprogressive

Contexte

Les traitements actuellement offerts contre la sclérose en plaques ciblent l’inflammation. Cette caractéristique leur permet de réduire la fréquence des poussées attribuables à la pénétration massive de cellules immunitaires dans le système nerveux central où elles détériorent la myéline, gaine protectrice des fibres nerveuses. Bien qu’ils soient efficaces contre les formes cycliques (poussées-rémissions) de SP, ces traitements n’ont pas d’effet positif sur les formes progressives de cette maladie. Reconnaissant la nécessité de mettre au point des médicaments immunomodulateurs contre ces dernières, le milieu scientifique international a entrepris des études et des essais cliniques visant à mieux comprendre la SP progressive.

Ce mois-ci, une équipe de chercheurs du Royaume-Uni a publié les résultats d’un essai clinique de phase II sur l’innocuité et l’efficacité (capacité d’apporter des bienfaits) d’un médicament hypocholestérolémiant, appelé simvastatine, chez les personnes présentant une forme progressive secondaire de SP. Les statines sont largement utilisées dans de nombreux pays pour diminuer le taux sanguin de « mauvais cholestérol » et le risque de cardiopathie et d’accident vasculaire cérébral. Des études récentes sur les souris montrent que ce type de médicament peut réduire l’inflammation et empêcher les cellules immunitaires de pénétrer dans le système nerveux central. Ces propriétés font des statines des candidats intéressants pour le traitement de la SP.


Description de l’étude

Le Dr Jeremy Chataway et ses collaborateurs, du Collège universitaire de London, ont lancé la phase II d’un essai clinique de deux ans, à laquelle participaient 140 volontaires présentant une forme progressive secondaire de SP. Ces volontaires étaient suivis dans trois centres de neurosciences du Royaume-Uni. La moitié d’entre eux (70) a reçu de fortes doses de simvastatine (80 mg/jour), et l’autre moitié a reçu un placebo (substance inactive). Les participants ont été répartis de manière aléatoire entre les deux groupes. Pour cet essai, les chercheurs ont eu recours à la méthode à l’insu, c’est-à-dire que ni les participants, ni les médecins qui administraient le traitement, ni le responsable de l’analyse des données ne savaient qui recevaient la simvastatine et qui recevaient le placebo. Cette méthode permet d’éviter les biais possibles dans l’interprétation des résultats. L’évolution de l’état des participants a été suivie durant deux ans. Cette étude visait à mesurer les effets de la simvastatine sur l’atrophie cérébrale (diminution du volume du cerveau), l’incapacité et le système immunitaire.


Résultats

Comparé au groupe placebo, le groupe simvastatine a montré une réduction de 43 % du taux d’atrophie cérébrale, ainsi qu’un ralentissement des changements fonctionnels, mesurés à l’aide de l’échelle d’incapacité ÉÉIK, et une amélioration des scores à l’évaluation des effets de la SP sur la vie quotidienne (échelle MSIS-29). Par contre, aucune différence n’a été observée entre les groupes dans les scores obtenus à l’échelle d'évaluation de la mobilité, de la dextérité et de la cognition (Multiple Sclerosis Functional Composite – MSFC) et dans le nombre de molécules associées à l’inflammation. En outre, le taux de survenue d’événements indésirables graves était sensiblement le même dans les deux groupes. Enfin, la simvastatine a été bien tolérée et n’a suscité aucune préoccupation en matière d’innocuité.


Commentaires

Globalement, les résultats de l’essai montrent que la simvastatine a un bon profil d’innocuité et des effets positifs sur l’atrophie cérébrale et l’incapacité chez les personnes présentant une forme progressive secondaire de SP. Ces résultats sont encourageants et justifient la mise en route d’études de phase III (menées auprès d’un très vaste groupe de personnes atteintes de SP) sur l’innocuité, l’efficacité et les effets à long terme de la simvastatine.
Cet essai est un autre bel exemple d’étude axée sur l’attribution de nouvelles indications pour les médicaments, c’est-à-dire qu’on évalue la pertinence d’ajouter une indication à un médicament existant. Ce genre d’étude favorise l’élaboration de nouvelles approches thérapeutiques, en particulier lorsque le temps et les ressources sont limités. Devant le peu de connaissances disponibles sur les formes progressives de sclérose en plaques et l’absence de traitements contre ces formes de SP, les chercheurs continuent d’étudier des médicaments actuels qui pourraient assurer une neuroprotection ou réparer les lésions. Cliquez ici pour en savoir plus sur la possibilité de traiter la SP progressive par des médicaments connus.


Source

CHATAWAY, J. et coll. « Effect of high-dose simvastatin on brain atrophy and disability in secondary progressive multiple sclerosis (MS-STAT): a randomised, placebo-controlled, phase 2 trial », The Lancet, le 19 mars 2014 [publié en ligne avant impression].