Courants de résilience : parcours d’une travailleuse spécialisée atteinte de SP

Témoignage de Christine 

« Lorsque j’ai quitté le domaine vétérinaire pour des raisons de santé, mon frère, qui est aujourd’hui décédé, m’a suggéré d’explorer les métiers spécialisés. J’ai commencé une formation d’apprentie auprès de l’une des plus grandes entreprises de services publics du Canada en 2017, j’ai obtenu le certificat de compétence 309A à titre d’électricienne (bâtiment et construction) en décembre 2021, et je suis devenue sous-contremaître en 2023.  

« J’ai reçu un diagnostic de SP en février dernier, mais j’ai souffert de divers symptômes pendant des années sans obtenir de réponses claires. J’ai des pertes d’équilibre, je suis maladroite, je laisse tomber des objets par mégarde, j’ai les jambes et les bras engourdis et des spasmes musculaires, j’ai de la difficulté à déglutir et je souffre de troubles urinaires, de brouillard cérébral, de fatigue, de tremblements intentionnels et de « l’étreinte de la sclérose en plaques » (sensation de serrement, d’engourdissement, de fourmillement ou d’oppression au niveau de la cage thoracique). Certains jours, je suis envahie d’une fatigue invalidante, et j’ai l’impression d’avoir des jambes de plomb. Je trouve parfois embarrassant d’avoir à utiliser fréquemment les toilettes ou de m’étouffer en mangeant.

« Le travail au sein d’une entreprise de services publics peut être difficile, mais il permet d’alimenter en électricité des milliers de clients de façon sécuritaire et fiable. Je travaille dans le secteur de la construction; mon équipe installe de gros transformateurs, des disjoncteurs et des commutateurs dans les centrales ainsi que les dispositifs de protection des différentes pièces d’équipement. Mes tâches varient au quotidien en fonction des projets. Il m’arrive de devoir enfiler un harnais et assembler un transformateur, tirer des câbles ou encore aider les techniciens affectés aux mesures de protection et de contrôle à faire les branchements dans les centres de commutation. 

« Chaque jour, j’évalue mon état afin de déterminer le type de tâches que je peux effectuer. Si je suis fatiguée ou que j’ai des problèmes d’équilibre, je ne pourrai pas grimper dans une échelle ou assembler des pièces en acier. Certains jours, je me consacre davantage à mon rôle de mentore auprès de mes apprentis. Je peux ainsi contribuer aux tâches quotidiennes sans pour autant être en première ligne. Lors de mes bonnes journées, personne ne peut deviner que j’ai la SP. En fait, certains de mes collègues de travail l’ignorent. 

« Évoluer dans un milieu principalement masculin comporte également son lot de difficultés. La plupart de mes collègues sont fantastiques, mais j’en croise parfois qui ne sont pas habitués à travailler avec des femmes. Les choses se passent généralement bien, parce que je sais me défendre et que je ne tolère pas le manque de respect. Je ne suis peut-être pas aussi forte qu’un homme, mais il existe plus d’une façon d’accomplir les tâches, et j’ai des outils à ma disposition. 

« La maladie dont je suis atteinte m’apprend à ralentir le rythme. Comme je travaille souvent sur la route, j’essaie de rattraper le temps perdu la fin de semaine. J’ai de la difficulté à entretenir la maison, parce que je n’ai pas assez d’énergie pour faire des loisirs et du ménage. Mon conjoint se débrouille bien avec la plupart des tâches, mais il travaille lui aussi à temps plein, en plus de s’occupes de nos animaux de compagnie. 

« J’ai des chevaux que j’adore monter dans mes temps libres! Je constate toutefois que j’ai des problèmes d’équilibre, et il m’arrive d’avoir de la difficulté à donner les bonnes commandes. J’ai appris à ne pas m’en faire, mais j’étais très frustrée au début. Comme je monte à cheval depuis que j’ai 11 ans, j’avais l’impression de régresser. 

« J’ai appris que je pouvais demander de l’aide, au travail comme dans ma vie personnelle. J’ai toujours été indépendante, mais j’ai compris que je n’ai pas besoin de tout faire par moi-même. J’ai aussi compris que j’avais le droit de me détendre à l’occasion. Le plus grand enseignement que j’ai tiré du fait de vivre avec la SP est que j’ai le droit d’être indulgente envers moi-même. La vie n’est pas parfaite, et c’est parfait comme ça. Ça ne sert à rien de toujours s’en faire, parce que le stress n’apporte rien de bon à long terme. 

« J’ai lu récemment une citation qui m’a touchée : “J’ai la SP, mais la SP ne mène pas ma vie.” J’espère pouvoir continuer de travailler dans les centrales et de monter à cheval. J’ai espoir que le médicament modificateur de l’évolution de la maladie que je prends m’aidera à maîtriser les symptômes de la SP pour que je puisse continuer de faire les choses que j’aime.  

« Si vous venez de recevoir un diagnostic de SP, sachez que le réseau de soutien est très important. Je ne fais pas seulement référence à la famille et aux amis. Trouvez une bonne équipe de soins qui vous aidera à atteindre vos objectifs. Consultez des sources fiables, comme SP Canada et les cliniques de SP de votre province, et tenez-vous loin de Google. Joignez-vous à un groupe de soutien pour discuter avec d’autres personnes qui vivent des expériences similaires aux vôtres. Personne n’a à lutter seul contre la SP. »