Il vit avec la SP depuis 70 ans

Le récit de Peter

Jeune de cœur à 97 ans, Peter vit avec la sclérose en plaques (SP) depuis plus de 70 ans. À l’époque où les options de traitement se comptaient sur les doigts de la main, Peter prenait lui-même en charge ses symptômes. En plus d’avoir un effet marquant sur son parcours, son approche a donné de la force à sa famille aimante et a doté celle-ci d’une grande capacité d’adaptation.

De la tombée du diagnostic à aujourd’hui, Peter et sa famille ont pu constater à quel point notre compréhension de la SP a évolué au fil des ans. Nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec Peter et ses fils pour discuter du parcours du combattant de Peter et du regard qu’ils portent sur une vie marquée par les hauts et les bas de la SP.

« J’ai le souvenir d’être en train de courir avec d’autres jeunes quand quelqu’un m’a dit : “Tu ne cours pas, tu marches!” C’était une façon sarcastique de dire que j’étais lent, mais je savais que quelque chose clochait », se souvient Peter. Au début de la vingtaine, Peter a finalement pu mettre un nom sur la maladie responsable de ses symptômes : la sclérose en plaques. Il savait que la SP nuisait grandement à sa mobilité et il était prêt à prendre les choses en main.

En 1950, le paysage de la SP était très différent. L’organisme aujourd’hui connu sous le nom de SP Canada n’existait que depuis deux ans, et la recherche n’en était qu’à ses balbutiements. Un diagnostic de SP s’accompagnait de beaucoup de questions sans réponse, mais Peter était déterminé à tout mettre en œuvre pour vivre une vie bien remplie. 

« Je savais que j’avais un problème, et j’étais prêt à travailler avec quiconque pouvait m’aider. J’étais un jeune célibataire qui vivait chez sa mère, et celle-ci devait s’assurer que le laitier nous apportait du lait écrémé! »

En collaboration avec une équipe de soins formée de médecins et d’un diététicien, Peter a misé sur une approche fondée sur l’alimentation pour prendre en charge ses symptômes. Cette approche lui réussit depuis des décennies. Il a coupé les gras saturés, les produits laitiers entiers et les viandes rouges. Il a également mis à l’essai de multiples approches axées sur le mouvement, dont le yoga – bien avant l’époque des vêtements tendance et des cours de yoga chaud! Peter affirme que le mouvement a eu un effet déterminant sur sa qualité de vie.

Les efforts de Peter pour prendre en charge les symptômes de la SP n’ont pas seulement influencé ses propres choix alimentaires; ils ont également laissé une impression durable sur ses enfants : « Mon père nous a transmis une leçon importante : une alimentation saine peut avoir un effet réel sur la santé. Je me souviens qu’il nous cassait les oreilles avec l’huile de cuisson. Et aujourd’hui, ma femme et moi tentons d’utiliser des huiles plus saines. Mon père a été une source d’inspiration pour nous, les enfants, en ce qui concerne notre alimentation. Disons que nous avons tendance à manger sainement. La pomme n’est pas tombée loin de l’arbre, comme on dit! », raconte Andrew, un des fils de Peter. 

En vieillissant, Peter a également montré à ses fils que l’indulgence envers soi-même faisait aussi partie du secret d’une vie épanouissante : « Il y a quelques années, une soignante m’a dit que mon père avait mangé un hot-dog et de la crème glacée pour dîner. J’étais abasourdi, puisque mon père avait toujours adhéré sans broncher à une diète stricte. Je l’entends encore me répondre lorsque je l’ai appelé pour lui en parler. Il m’a dit, d’un ton presque gêné : “Tu sais, je commence à me permettre de petites gâteries.” J’ai trouvé ça très mignon, et je lui ai répondu : “À 95 ans, je pense qu’il n’y a pas de mal à ça!” 

En réfléchissant au parcours de sa famille, Andrew insiste également sur l’importance d’avoir une bonne attitude : « Nous avons appris que l’attitude est importante. Mon père est un homme très humble et plein de gratitude qui se concentre sur ce qu’il a plutôt que sur ce qu’il n’a pas. »

Peter, qui a chanté dans un quatuor et a fait carrière sur la route, n’a jamais laissé la SP l’empêcher de vivre ses passions et de bâtir une vie enrichissante et remplie d’amour. Au moment du diagnostic, Peter dit qu’il n’avait pas la fibre du voyageur. Dans les années qui ont suivi, il s’est pourtant surpris lui-même. En plus d’apprendre à conduire, il a accepté un poste de représentant qui l’a mené à passer beaucoup de temps sur la route.

« C’est comme si j’avais oublié ce que je n’étais pas censé faire! », dit Peter à la blague. Selon lui, il faut parfois faire fi des interdits pour mener la vie que l’on souhaite. L’attitude positive de Peter, jumelée à une pincée de gratitude et à un brin de rébellion, n’a pas seulement défini son parcours : elle a tracé la voie d’une belle aventure pour lui et sa famille.

La famille a pourtant connu des moments difficiles : « Dans notre jeunesse, nous nous sentions parfois seuls devant les difficultés qu’éprouvait notre père à simplement entrer et sortir des magasins et des restaurants. À l’époque, les endroits accessibles où il pouvait se rendre sans assistance étaient plutôt rares », se souvient Andrew.

 L’histoire familiale de Peter fait écho à celle de nombreuses autres personnes contraintes d’évoluer dans un monde où l’accessibilité n’est pas une priorité. Devant l’adversité, la famille de Peter a toutefois choisi d’aller de l’avant en se serrant les coudes. 

Lorne, un autre des fils de Peter, se remémore sa jeunesse : « Mes plus lointains souvenirs sont ceux de nos promenades ou de nos excursions au parc. Un jour, mon père a commencé à utiliser une canne, mais il était encore un beau grand monsieur qui marchait droit. Et, peu à peu, il a dû prendre appui sur notre épaule. » 

Dans un monde en constante évolution, Peter a un conseil qui vaut en toutes circonstances : « Vivez votre vie! » L’histoire de Peter est en une de résilience; elle témoigne de l’importance de la famille et des moments charnières qui définissent le parcours de vie des personnes atteintes de SP. Et comme le dit si bien Andrew : « La SP impose des limites, mais elle n’a pas à limiter votre capacité à vivre une vie longue et productive. »